Une décision présidentielle vient de mettre un terme à l’un des dossiers judiciaires les plus médiatisés de l’année 2024 en République Démocratique du Congo. Marcel Malanga, Benjamin Zalman-Polun et Taylor Thompson, les trois citoyens américains condamnés à mort pour leur implication dans la tentative de coup d’État du 19 mai dernier, ont finalement été graciés par le président Félix Tshisekedi. Leur peine capitale a été commuée en prison à perpétuité, avant qu’ils ne soient discrètement transférés vers les États-Unis ce mardi 8 avril 2025.
Cette affaire, qui a défrayé la chronique politique et judiciaire en RDC, trouve ainsi une issue inattendue après près d’un an de procédures. Les trois hommes avaient été reconnus coupables par la justice militaire congolaise des chefs d’accusation particulièrement graves : association de malfaiteurs, actes terroristes et tentative de renversement des institutions constitutionnelles. Leur condamnation à la peine suprême en septembre 2024, confirmée en appel en janvier dernier, avait immédiatement provoqué des réactions diplomatiques vives de la part des autorités américaines.
L’ordonnance présidentielle du 1er avril 2025, lue par la porte-parole de la présidence Tina Salama, marque un tournant dans ce dossier sensible. « Le président de la République a usé de son droit de grâce pour commuer la peine de mort en détention criminelle à perpétuité », avait-elle déclaré sur les ondes de la télévision nationale. Une décision interprétée par les observateurs politiques comme un geste stratégique en direction de Washington, alors que les deux pays négocient plusieurs accords clés dans les domaines minier et sécuritaire.
L’évacuation des trois condamnés s’est déroulée sous haute sécurité depuis la prison militaire de Ndolo, où ils étaient détenus depuis leur arrestation. Selon des sources proches du dossier, le transfert a été coordonné avec l’ambassade des États-Unis à Kinshasa, aboutissant à leur départ vers le territoire américain où ils purgeront désormais leur peine. Les modalités exactes de leur incarcération outre-Atlantique n’ont pas été précisées, mais cette extradition met fin à une saga judiciaire qui aura profondément marqué les relations bilatérales entre les deux nations.
Rappelons que cette affaire trouve son origine dans l’attaque armée contre la résidence de Vital Kamerhe, alors ministre d’État, avant que les assaillants ne se dirigent vers le Palais de la Nation dans la nuit du 19 mai 2024. L’opération, menée par Christian Malanga – père de l’un des condamnés et tué lors de l’intervention des forces de l’ordre – avait été qualifiée de tentative de coup d’État par les autorités congolaises. Au total, 37 personnes avaient été condamnées à mort dans ce dossier, dont trois ressortissants américains, un Canadien et un Belge.
Si la grâce présidentielle accordée aux Américains semble apaiser les tensions diplomatiques, elle soulève néanmoins des questions cruciales quant au traitement judiciaire différencié des coaccusés. Qu’en sera-t-il des autres condamnés, notamment les nationaux congolais et les deux autres étrangers impliqués dans cette même affaire ? Pour l’heure, aucune mesure similaire n’a été annoncée à leur encontre, laissant planer le doute sur l’équité du système judiciaire dans ce dossier exceptionnel.
Cette décision intervient dans un contexte politique sensible, où la RDC cherche à renforcer sa position sur l’échiquier international tout en affirmant sa souveraineté judiciaire. Les analystes s’interrogent désormais sur les implications à long terme de ce geste présidentiel, tant sur le plan intérieur qu’en matière de relations internationales. Une chose est certaine : cette affaire restera dans les annales comme un cas d’école des complexités entre justice nationale et diplomatie internationale.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: linterview.cd