Dans les hautes terres du Grand-Nord-Kivu, une onde de choc secoue le paysage sécuritaire déjà volatile. Les Maï-Maï Wazalendo, groupes armés opérant dans les zones de Beni, Butembo et Lubero, ont claqué la porte à toute négociation politique avec l’AFC/M23 et leurs soutiens rwandais. Par une déclaration incendiaire rendue publique mardi 29 avril, ces combattants alliés aux FARDC jettent un pavé dans la mare des initiatives diplomatiques en cours.
Leur argumentaire frappe par sa virulence historique. « De l’AFDL au M23, les accords avec les rébellions n’ont engendré que chaos et impunité », assène Assa Mahamba, porte-parole des Wazalendo. Un réquisitoire implacable qui pointe du doigt trois décennies d’échecs : démantèlement des forces de sécurité, légitimation des prises de pouvoir par les armes, sacrifiant au passage des milliers de civils congolais.
La charge ne s’arrête pas là. Les médiations qatariennes, américaines et africaines subissent un tir de barrage. « Ces démarches servent des intérêts étrangers, pas ceux du peuple congolais », clament les combattants. Comment justifier l’absence des premiers concernés dans les pourparlers de paix ? La question, lancinante, révèle une fracture majeure dans la gestion de cette crise.
Plus troublant encore : l’appel à l’armée ougandaise. Les Wazalendo réclament une formation par l’UPDF, pourtant perçue ailleurs comme une force d’occupation. Un paradoxe qui interroge sur les alliances mouvantes dans cette région en ébullition permanente. Leur projet d’intégration à la Réserve armée de la défense (RAD) marque-t-il un virage stratégique ou un calcul politique ?
En filigrane de ce manifeste, une obsession : l’intangibilité des frontières congolaises. « La RDC n’est pas une mine ouverte aux prédateurs », tonne la déclaration. Un avertissement sans équivoque aux puissances étrangères, accusées de nourrir le conflit pour mieux piller les ressources.
Cette prise de position intervient dans un contexte sécuritaire explosif. Alors que les FARDC enregistrent des revers sur le terrain, le refus des Wazalendo de poser les armes complique la donne. Leur radicalisation annonce-t-elle une nouvelle escalade militaire ? Ou traduit-elle la lassitude face à des processus de paix perçus comme des leurres ?
Les analystes s’interrogent sur les répercussions régionales de cette déclaration. En rejetant toute médiation externe, les Wazalendo risquent d’isoler Kinshasa sur l’échiquier diplomatique. Un pari dangereux, alors que la communauté internationale multiplie les appels au dialogue.
Reste une énigme : cette fronde des groupes armés locaux sonne-t-elle le glas des solutions négociées ? Ou constitue-t-elle un ultime baroud d’honneur avant un inévitable retour à la table des discussions ? L’avenir immédiat du Kivu, suspendu à cette équation, pourrait bien dépendre de la capacité des acteurs à transcender les rancoeurs du passé.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd