Dans le secteur de Katoyi, territoire de Masisi au Nord-Kivu, une onde de choc traverse les communautés locales. Des sources administratives et une organisation de défense des droits humains – souhaitant garder l’anonymat – alertent sur les exactions systématiques commises par la Coalition des patriotes résistants congolais (PARECO-FF). Ce groupe armé, dirigé par le chef milicien Kigingi Jean de Dieu, aurait érigé un système de terreur depuis plusieurs semaines.
Selon le rapport accablant publié ce lundi 28 avril, dix catégories de violations des droits humains ont été identifiées. Au cœur des préoccupations : l’instauration d’une administration parallèle. Taxes illégales sur les marchandises, jugements arbitraires des conflits familiaux ou fonciers, prélèvements forcés sur les voyageurs… La milice aurait institutionnalisé son emprise sur le quotidien des habitants.
« Les percepteurs publics ont dû fuir vers le groupement d’Ufamandu il y a quinze jours », révèle une source locale sous couvert d’anonymat. Le bureau du secteur de Katoyi, symbole de l’autorité étatique, aurait été saccagé et pillé début avril par ces combattants se réclamant des VDP/Wazalendo. Une situation qui interroge sur la capacité des forces régulières à contrôler cette zone frontalière des territoires contestés du Nord-Kivu.
Plus inquiétant encore : la multiplication des barrières illicites. Chaque point de contrôle devient l’occasion d’extorsions en série. « Comment une milice peut-elle imposer sa loi en toute impunité ? », s’interrogent des acteurs de la société civile. Ces pratiques surviennent dans un contexte sécuritaire déjà délétère marqué par la présence persistante des rebelles du M23 aux alentours.
Les appels à l’aide se multiplient vers Kinshasa. Les autorités provinciales et nationales sont sommées d’intervenir pour « rétablir l’ordre constitutionnel et protéger les civis ». Pourtant, sur le terrain, aucune opération militaire d’envergure n’a encore été signalée. Cette inertie relance le débat sur la gouvernance sécuritaire dans l’est de la RDC, région minée par les conflits armés récurrents.
En parallèle, des questions émergent sur le statut réel des groupes VDP/Wazalendo. Initialement présentés comme des « forces d’autodéfense », certains de leurs éléments semblent reproduire les méthodes des milices qu’ils prétendaient combattre. Un paradoxe qui complique la lecture des dynamiques conflictuelles dans cette partie des Kivus.
Alors que les analyses politiques RDC pointent du doigt les failles de l’État de droit, les habitants de Katoyi vivent sous la coupe d’une justice expéditive. Les litiges les plus banals sont tranchés par des chefs militaires sans formation juridique. Une dérive qui rappelle sombrement les pires heures de la crise sécuritaire au Nord-Kivu.
La balle est désormais dans le camp des autorités congolaises. Entre pressions internationales et exigences locales, le gouvernement devra trancher : négocier avec ces groupes ou lancer une offensive militaire risquée ? En attendant, les civils paient le prix fort d’une guerre de l’ombre qui mine durablement le tissu social congolais.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net