Depuis la fin de 2017, la province de l’Ituri reste le théâtre d’une escalade de violences communautaires qui fait encore trembler les populations locales. Dans le territoire de Djugu, berceau historique de la violence et du conflit avec l’émergence du groupe armé CODECO, la situation se dégrade de manière alarmante, mêlant actes barbares et impacts sociaux dévastateurs. Le rapport récemment diffusé par Médecins Sans Frontières (MSF), intitulé « Risquer sa vie pour survivre », révèle des conséquences dramatiques sur l’ensemble des infrastructures sanitaires et met en lumière le destin tragique de milliers de déplacés confrontés à des traumatismes psychologiques graves.
Le document de MSF, fruit d’une analyse minutieuse sur plusieurs années, décrit une région en tourmente où les populations civiles se retrouvent prises en otage d’un conflit dont l’ampleur dépasse les chiffres. De décembre 2022 à novembre 2023, le bilan fait état de 1 491 morts et 422 blessé·e·s, témoignage cruel de la violence qui s’est abattue sur la province. Les capacités de prise en charge, notamment en chirurgie traumatologique, sont mises à rude épreuve, conduisant MSF à renforcer son soutien à la clinique Salama de Bunia, véritable bastion contre la dégradation des soins médicaux dans la région.
L’impact de ce conflit ne se limite pas aux seuls bilans humains. Le rapport met en exergue une crise humanitaire qui s’étend à travers divers territoires comme Mahagi, Irumu et Mambasa. Depuis 2018, le nombre de personnes déplacées a plus que doublé, passant d’environ 571 000 à près de 1,36 million de personnes, soit près de 18 % de la population de l’Ituri. Face à cette mobilité forcée, la vulnérabilité des populations augmente d’autant que l’insécurité semble devenir la norme quotidienne. Comment ne pas s’interroger sur l’avenir de ces communautés dépossédées de leurs repères, menacées de voir se dissoudre les liens sociaux qui les unissaient autrefois ?
Dans le tumulte de ces affrontements, les séquelles psychologiques jouent un rôle central. Les victimes, souvent marquées par des souffrances dues à des pertes familiales, des déplacements multiples et la perte de leurs biens, se retrouvent confrontées à des troubles émotionnels et anxieux. L’ampleur des traumatismes est telle que les séquelles, dont le stress post-traumatique, risquent de perdurer si les prises en charge psychologiques ne se renforcent pas. Le cas de la localité de Drodro, où une attaque a provoqué une vague de fuite massive vers le site de déplacés de Rho, en est un triste exemple. Les psychologues de MSF constatent une hausse significative des troubles liés à l’exposition directe ou indirecte à la violence, incluant également des violences sexuelles qui exacerbent la détresse des populations.
Chaque jour, des civils se voient confrontés à l’imprévisible, leur vie étant constamment mise en péril par la présence d’armed groups et de milices diverses qui, au nom de la défense communautaire, ne cessent d’alimenter un climat de terreur. Cette crise, qui semble désormais s’inscrire dans la durée, suscite une inquiétude profonde tant au niveau national que dans le contexte des Actualités RDC et des Nouvelles congolaises en général. On ne peut qu’invoquer le principe fondamental de protection des civils, écho à des enjeux de sécurité et de stabilité qui résonnent bien au-delà des frontières de l’Ituri.
Dans un contexte global où l’actualité internationale observe avec une vive attention les conflits armés, l’Ituri n’échappe pas aux analyses pointues des experts en sécurité et des journalistes d’investigation. Ce dossier, qui marie la tragédie humaine à des enjeux géopolitiques, interroge sur les mécanismes qui permettent aujourd’hui la propagation de telles violences et sur la capacité des institutions à protéger efficacement leurs populations. La situation en Ituri, résumée par ce rapport percutant, reste un signal d’alarme pour l’ensemble des acteurs humanitaires et de sécurité en RDC. La quête de solutions pérennes pour désamorcer le cycle de la violence est devenue une priorité absolue pour éviter que ces drames ne s’amplifient davantage à l’échelle régionale.
En définitive, ce rapport de MSF sur la province de l’Ituri offre un éclairage saisissant sur une réalité souvent occultée par l’ombre des conflits. Il souligne l’urgence d’une action concertée pour rétablir l’ordre et sécuriser les zones vulnérables, tout en appelant à une prise en charge renforcée des victimes, tant sur le plan médical que psychosocial. La situation dramatiquement pesante en Ituri pose une question fondamentale : jusqu’à quand les populations devront-elles subir le poids d’une violence incessante, marquant durablement leurs vies et leur avenir ?
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
