La situation sécuritaire au Nord-Kivu atteint des sommets d’inquiétude alors que les rebelles du M23, renforcés par l’armée rwandaise, ont imposé leur contrôle sur quatre des six chefs-lieux des territoires de la province : Walikale-centre, Masisi-centre, Kibumba et Rutshuru. Cette avancée stratégique, qui inclut également la ville de Goma depuis janvier dernier, soulève des questionnements pressants sur la capacité de Kinshasa à rétablir l’ordre. Parallèlement, Lubero-centre et Oicha demeurent les dernières grandes agglomérations encore tenues par les forces gouvernementales, même si le contrôle est partiel à Lubero.
Sur fond de cette crise territoriale, l’impact économique sur la région est dévastateur. Les postes douaniers désormais entre les mains des rebelles incluent Ishasha et Bunagana, à la frontière ougandaise, ainsi que celui de Goma, à la frontière rwandaise. Ces pertes stratégiques privent la province de précieux revenus, exacerbant la crise financière du Nord-Kivu où les fonctionnaires sont déjà coupés de leurs moyens de subsistance. Les zones minières, autrefois vitales pour l’économie locale, sont également tombées sous la coupe des rebelles. La prise de Rubaya et de Musigha, riches respectivement en coltan et en or, illustre combien cette rébellion impacte non seulement la sécurité mais également les perspectives économiques d’une province déjà durement éprouvée.
Les tensions au Nord-Kivu s’étendent aussi sur le plan environnemental et humanitaire. Dans le secteur de Bapere, deuxième massif forestier de Lubero, la cohabitation fragile entre exploitants artisanaux et groupes armés a éclaté. La fuite des creuseurs et exploitants en raison des incursions des Forces Démocratiques Alliées (ADF), alliées de fait des rebelles M23, a davantage fragilisé l’économie locale. Des villages comme Baswagha deviennent des scènes de terreur alors qu’insécurité et massacres poussent les populations à déserter leurs lieux de vie.
Kinshasa, malgré sa nomination d’un nouveau gouverneur militaire pour succéder à Peter Cirimwami, peine à inverser la dynamique sur le terrain. Si ses bastions incluent encore les villes stratégiques de Beni et Butembo, ces dernières restent sous une menace existentielle constante. Le futur de la province dépendra non seulement d’une réponse militaire coordonnée mais également d’une stratégie économique et diplomatique solide pour contrer les soutiens extérieurs présumés du M23.
Face à ces développements dramatiques, il devient primordial de réfléchir à des solutions immédiates mais aussi à long terme pour restaurer la paix. La communauté internationale, jusqu’ici timide, pourrait jouer un rôle central dans la résolution de cette crise complexe. Peut-on réellement tourner la page des violences chroniques sans adresser les causes profondes de ces conflits ? Le Nord-Kivu mérite des actions concrètes et rapides avant qu’il ne sombre davantage.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd