Le procès tant attendu du scandale Bukangalonzo, impliquant l’ancien Premier ministre congolais Augustin Matata Ponyo, a repris ce lundi à la Cour constitutionnelle, suscitant une vaste polémique dans l’opinion publique congolaise avec des reproches de motivations politiques camouflées sous un écran judiciaire. Le dossier, centré sur un présumé détournement de plus de 200 millions de dollars destinés au parc agro-industriel de Bukanga Lonzo, revient sur le devant de la scène dans un contexte politique particulièrement électrique.
Malgré la relance officielle de l’affaire, Augustin Matata Ponyo était absent à l’audience de ce lundi pour une raison inattendue : une non-convocation. Dans une sortie médiatique vendredi dernier, le député national élu de Kindu a fait entendre sa voix sur cette réouverture, affirmant fermement son sentiment d’injustice. “Ce dossier, davantage politique que judiciaire, réapparaît à chaque initiative du régime visant à ratisser large”, a-t-il déclaré. L’ancien chef du gouvernement n’a pas mâché ses mots, qualifiant cette affaire de “manœuvre politique” orchestrée pour mettre à mal sa stature politique.
Pour l’homme qui a récemment rejoint les rangs de l’opposition, les motivations de cette relance vont au-delà du simple cadre judiciaire. Selon lui, cette affaire est réactivée à des moments clés pour freiner ses ambitions politiques, notamment l’empêcher de consolider son parti, le Leadership et Gouvernance pour le Développement (LGD), ou encore dissuader sa candidature potentielle pour la prochaine présidentielle. “Aujourd’hui, elle ressurgit pour me mettre sous pression alors que se profilent un dialogue politique et un gouvernement d’union nationale”, accuse-t-il, dénonçant une instrumentalisation des institutions juridiques.
Cette critique ferme s’accompagne d’un rappel de l’histoire controversée de cette affaire. En 2021, sous la présidence de Dieudonné Kaluba, la Cour constitutionnelle s’était déclarée incompétente pour juger un ancien Premier ministre. Cependant, sous de nouvelles directions, l’approche semble avoir changé, provoquant la colère de Matata Ponyo qui voit dans ce retournement une influence directe de la présidence actuelle. L’ancien Premier ministre n’épargne pas les attaques : “Le professeur Dieudonné Kaluba, brillant constitutionnaliste, a été évincé de la Cour comme un vulgaire va-nu-pieds”. Une remarque marquante traduisant son sentiment de frustration face à un système juridique qu’il estime manipulé.
Quant à l’audience de ce lundi, non seulement Augustin Matata Ponyo, mais aussi les coaccusés, notamment l’homme d’affaires Christo Grobler et l’ancien gouverneur de la Banque centrale, Déogratias Mutombo, étaient absents. Ainsi, la Cour a décidé de reporter les délibérations au 14 mars, déclarant que cette date sera une remise contradictoire. En d’autres termes, les accusés ne pourront plus invoquer l’absence de convocation lors de cette prochaine audience.
Cette affaire continue de diviser les Congolais, entre ceux qui y voient une quête légitime de justice dans une affaire financière particulièrement flagrante et ceux qui y perçoivent une manœuvre politique visant à briser une opposition en pleine reconstruction. Dans un contexte où les enjeux électoraux battent déjà leur plein, cette affaire promet de rester au cœur des débats politiques et médiatiques. Une question persiste toutefois : le système judiciaire congolais est-il encore perçu comme un arbitre impartial, ou est-il devenu l’outil d’intérêts politiques plus larges ? Seule la suite des événements pourra apporter un début de réponse.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd