Dans un contexte marqué par une crise sécuritaire préoccupante à l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), un rapport de l’Institut Ebuteli, publié à travers son outil de suivi parlementaire Talatala, suscite l’indignation. Entre septembre et décembre 2024, pas moins de 170 initiatives de contrôle parlementaire ont été déposées. Pourtant, seules sept d’entre elles ont été examinées en plénière. Plus troublant encore, aucune de ces initiatives ne portait sur la crise sécuritaire dévastatrice qui secoue l’Est du pays.
Alors que les regards étaient braqués sur les affrontements avec le groupe rebelle M23/AFC, soutenu par le Rwanda, le silence du parlement face à cette situation était éloquent. Le rapport de Talatala souligne : « Alors que les affrontements s’intensifiaient sur le terrain, l’Assemblée nationale est restée silencieuse, jusqu’à ce que la chute de Goma la contraigne à réagir. » Ce document pointe également la réaction tardive du parlement, qui n’a convoqué une session extraordinaire qu’après la tombée de Goma et Bukavu aux mains des rebelles. Une initiative jugée insuffisante, d’autant plus que plusieurs propositions en lien avec la sécurité étaient déjà sur la table.
Entre le 15 septembre et le 15 décembre 2024, certaines initiatives déposées abordaient spécifiquement les défis sécuritaires. Ainsi, le député Élie Kambale avait soumis une question orale avec débat sur la situation au Nord-Kivu et en Ituri. De son côté, Marcel Zuma avait demandé des explications sur les violences persistantes au Bas-Uélé, en Haut-Uélé et dans le Nord-Ubangi. Quant au député Gratien Iracan, il avait interpellé le Vice-Premier Ministre de la Défense sur des allégations de collaboration entre les Forces Armées de la RDC (FARDC) et des groupes armés en Ituri. Ces démarches, bien que pertinentes, sont restées lettre morte.
Le record de 170 initiatives déposées lors de la session ordinaire de septembre 2024 illustre un engagement marqué des parlementaires pour le contrôle et l’information. Pourtant, jamais auparavant, selon Talatala, un si grand nombre d’initiatives n’avait été ignoré. La session extraordinaire de février 2025, organisée en réponse à l’effondrement du front sécuritaire, a permis la formation d’une commission mixte Assemblée nationale – Sénat. Cette commission devait formuler des propositions pour une sortie de crise, mais son impact reste à évaluer.
Cette situation soulève des interrogations sur la réactivité et la pertinence des travaux du parlement face aux défis auxquels fait face la population. Pourquoi a-t-il fallu attendre que le territoire échappe au contrôle des autorités pour que des actions concrètes soient engagées ? Cet immobilisme institutionnel reflète-t-il une impuissance politique ou un désintérêt pour des problématiques clés de la nation ?
Alors que les habitants du Nord-Kivu, de l’Ituri et d’autres provinces affectées attendent des réponses concrètes, cette inertie parlementaire pourrait avoir des conséquences lourdes pour la confiance des citoyens envers leurs institutions. La gestion de cette crise constitue un véritable test pour la capacité de la RDC à relever ses défis sécuritaires et politiques.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd