Dans l’effervescence de Kinshasa, où le fleuve Congo semble murmurer les mélodies d’un passé glorieux, la ville s’apprête à vivre quatre jours de célébrations envoûtantes. Dès ce jeudi 24 avril, la capitale congolaise se pare des couleurs de la mémoire pour honorer Papa Wemba, disparu il y a neuf ans. Une légende dont les notes résonnent encore dans l’âme collective, comme un refrain intemporel.
Au Centre Culturel et Artistique des Pays de l’Afrique centrale, face au Palais du Peuple, l’hommage prend des allures de symphonie visuelle et sonore. Exposition, projections cinématographiques, concerts… Chaque activité tisse une toile entre hier et aujourd’hui. Comment ne pas frémir devant ces archives où l’artiste, surnommé « le Pape de la rumba », électrise les foules ? Ses costumes flamboyants, sa voix de velours – fragments d’une étoile qui continue d’éclairer la culture RDC.
Plus loin, sur le Boulevard Triomphal, le Musée national de la RDC déploie jusqu’au 11 mai l’exposition « 100% Star ». Un voyage dans l’intimité créative de Papa Wemba : partitions manuscrites, costumes iconiques, photographies jaunies par le temps mais vibrantes de vie. « C’est un dialogue entre l’artiste et les nouvelles générations », confie un conservateur, sous le regard d’une statue de l’icône, figée dans une pose de danse éternelle.
La soirée du 24 avril promet une ascension lyrique. Les sapeurs, gardiens du mouvement d’élégance lancé par l’artiste, défileront dans un ballet de costumes trois-pièces et de chapeaux inclinés avec audace. Une performance où la mode devient manifeste politique, comme Papa Wemba l’avait imaginé : « La SAPE, c’est l’art de transformer les épreuves en beauté. » Entre deux accords de guitare, des musiciens locaux reprennent ses tubes, tandis que des jeunes, nés après sa disparition, scandent ses refrains – preuve que la musique congolaise reste un héritage vivant.
Mais cet hommage dépasse le simple devoir de mémoire. Dans un pays où la politique RDC et les défis économiques dominent souvent les débats, ces festivités rappellent que l’âme d’une nation se nourrit aussi de ses mythes culturels. « Papa Wemba n’était pas qu’un artiste, c’était un architecte de l’identité congolaise moderne », souligne un universitaire lors d’une table ronde. Une identité forgée dans le creuset de la rumba, cette « musique qui fait danser même les pierres », selon une légende kinoise.
Alors que la lune se lève sur le fleuve Congo, une question persiste : comment un homme mort sur scène à Abidjan continue-t-il d’unir un peuple ? Peut-être grâce à ces notes de rumba qui, telles des racines invisibles, relient les mémoires et les rêves. Les activités se poursuivront jusqu’au 27 avril, mais déjà, Kinshasa vibre au rythme d’une certitude : Papa Wemba n’est pas parti. Il chuchote dans le crépitement des vinyles, danse dans le froissement des costumes, et vit – éternellement – dans l’âme de la culture RDC.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net