Dans la gare de Mwene Ditu, au Kasaï-Central, l’odeur de la détresse se mêle à la poussière des rails. Une centaine de passagers du train New Express Diamant Béton, exploité par la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC), vivent un calvaire depuis près d’une semaine. Bloqués à 130 km de Mbuji-Mayi, ces voyageurs, dont de nombreux enfants, dorment à même le sol, sous un ciel indifférent. « Nous sommes traités comme des invisibles », lance Jean*, un père de famille épuisé, les yeux rivés sur des rails qui ne mènent nulle part.
Le drame a commencé avec un déraillement à Kalule Nord, dans le Haut-Katanga, selon des sources locales. Pour ces Congolais partis de Mbuji-Mayi ou Kabinda, destination Haut-Katanga ou Haut-Lomami, le voyage s’est transformé en piège. La SNCC propose-t-elle des solutions à la hauteur de l’urgence ? Les promesses de départ fixées au 20 avril se sont évaporées, remplacées par une offre de transfert jusqu’à Luena, laissant les voyageurs livrés à eux-mêmes. « Et après Luena ? Qui paiera notre survie ? », interroge Marie*, une commerçante en route pour Kamina.
Le quotidien des bloqués ressemble à un inventaire de l’absurde : 500 francs congolais pour accéder aux toilettes, de l’eau à acheter pour cuisiner ou se laver, aucune prise en charge médicale signalée. Pendant ce temps, la SNCC aurait procédé à des remboursements pour certains billets. Mais comment expliquer cette gestion à deux vitesses ? La société ferroviaire, pilier des actualités économiques RDC, semble naviguer en eaux troubles, entre héritage colonial et défis logistiques contemporains.
Cette crise met en lumière une réalité plus large : l’état des infrastructures de transport en RDC, sujet récurrent des analyses politiques RDC. Le chemin de fer, vital pour désenclaver les régions comme le Kasaï-Central ou le Haut-Katanga, fonctionne-t-il encore ? Entre les retards chroniques et les accidents, les usagers développent une résilience à toute épreuve. « Voyager en train, c’est parier sa vie », résume un habitant de Mbuji-Mayi joint par téléphone.
Derrière les chiffres – une centaine de personnes bloquées – se cache un drame humain. Des enfants privés d’école, des malades sans accès aux soins, des denrées périssables perdues. La solidarité locale suffira-t-elle à combler les carences institutionnelles ? À Mwene Ditu, certains riverains apportent de la nourriture, gestes nobles mais éphémères face à un système défaillant.
Cette situation pose une question cruciale : jusqu’où peut s’étendre la patience des Congolais face aux défailles des services publics ? Alors que les nouvelles congolaises relaient régulièrement des crises similaires à Goma ou Lubumbashi, le cas de Mwene Ditu pourrait cristalliser un mécontentement plus profond. Les prochains jours diront si la SNCC parviendra à restaurer la confiance – et les rails.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net