Entre poésie engagée et performance électrisante, le slameur congolais Corneille Chabala a illuminé la quatrième édition du Festival Slamouv à Brazzaville. Du 10 au 13 avril, la scène culturelle congolaise a vibré au rythme des mots ciselés de cet artiste lushois, dont la prestation d’ouverture restera gravée dans les mémoires comme un moment de grâce artistique et de conscience collective.
Dès son entrée en scène, l’artiste a imposé une présence théâtrale et symbolique. Enveloppé d’une fumée blanche, brandissant le drapeau de la RDC avec une fierté palpable, vêtu d’une tenue noire surmontée d’une chemise bleue, Chabala s’est présenté en ambassadeur des voix étouffées de l’Est du Congo. Son apparition ne fut pas simplement une entrée en scène, mais une véritable incarnation des douleurs et des espoirs d’une région meurtrie.
Dans un slam d’une intensité rare, le jeune artiste de 27 ans a tissé un dialogue poignant entre art et militantisme. « Quelque part à l’Est de mon pays en ce moment, il fait sombre », a-t-il déclaré, créant immédiatement une connexion viscérale avec le public. Ses mots, chargés d’une émotion brute, ont dressé un pont entre la scène brazzavilloise et les ténèbres qui enveloppent les provinces orientales de la RDC.
La performance de Chabala a transcendé le simple cadre artistique pour devenir un acte politique et humaniste. Son appel à l’unité africaine – « nous sommes un seul peuple, on est un peuple africain uni de par nos racines » – a résonné comme un mantra contemporain, rappelant les liens indéfectibles qui unissent le continent au-delà des frontières héritées de la colonisation.
L’impact de sa prestation fut immédiat et profond. Le public, submergé par l’émotion, s’est levé comme un seul homme, certains allant jusqu’à embrasser l’artiste, dans une communion rare entre scène et salle. Ce moment de grâce a révélé la puissance d’un art qui ne se contente pas d’émouvoir, mais qui transforme, qui éveille les consciences.
À seulement 27 ans, Corneille Chabala représente bien plus qu’une simple révélation de la scène culturelle RDC. Fort de sept années de carrière et couronné vice-champion du Championnat d’Afrique de Slam Poésie en 2022, il incarne cette nouvelle génération d’artistes africains qui mêlent excellence artistique et engagement social. Son surnom de « nouvelle étoile » prend ici tout son sens : il ne se contente pas de briller, il éclaire.
Cette performance au Festival Slamouv confirme l’émergence d’une voix majeure dans le paysage culturel congolais et africain. Entre tradition orale et modernité poétique, entre dénonciation et célébration de l’identité africaine, Corneille Chabala réinvente le slam comme art total, à la fois miroir et marteau de la réalité sociale. Son passage à Brazzaville ne fut pas simplement un spectacle, mais un moment de grâce où l’art a retrouvé sa fonction première : dire l’indicible, réveiller les consciences et rassembler les cœurs.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd