Dans le territoire d’Aru, situé dans la province de l’Ituri en République Démocratique du Congo, plus de 15 000 tonnes de produits agricoles sont chaque année exportées frauduleusement vers l’Ouganda voisin. Selon le bureau des agronomes de la chefferie de Kakwa, cette région surnommée le « grenier agricole » de la province, maïs, haricots, riz et arachides traversent illégalement la frontière pour être consommés bruts ou transformés par les industries ougandaises.
Cette exportation parallèle, facilitée par des acheteurs ougandais venant jusqu’aux champs congolais ou achetant sur les marchés locaux en shilling ougandais, constitue un grave manque à gagner pour la RDC. Cette situation prive notamment les agriculteurs de revenus équitables et contribue à une carence de produits agricoles sur le marché local. Alphonse Bourille, un acteur de développement communautaire, met en garde : « Avec cette baisse de production, nous craignons une crise et une sous-alimentation imminentes. »
Le constat est alarmant pour les habitants d’Aru, déjà menacés par une crise alimentaire et une probable hausse des prix. La responsable locale des agronomes, Joséphine Tokota, appelle le gouvernement congolais à agir en urgence. Elle préconise la création d’usines de transformation dans le pays, afin de stopper l’hémorragie des ressources agricoles. Un tel investissement ne se limiterait pas à enrayer la fuite illégale ; il encouragerait également une production locale durable tout en renforçant la valeur de la monnaie congolaise.
Cette exportation frauduleuse met en lumière l’absence de contrôle aux frontières et l’insuffisance d’une vision stratégique gouvernementale dans le secteur agricole. Alors que plus de 70 % des Congolais dépendent de l’agriculture pour leur subsistance, le pays demeure « en dépendance totale des pays voisins », regrette Joséphine Tokota. Une situation d’autant plus paradoxale que l’Ituri regorge de potentiels agricoles inexploités.
Doit-on s’attendre à une dégradation accrue de la sécurité alimentaire en RDC ? En tout cas, pour les acteurs locaux, il s’agit d’un signal d’alarme pour un secteur négligé mais vital. Pour faire face à cette crise naissante, un renforcement des infrastructures agricoles, des mécanismes de contrôle transfrontalier et un appui aux agriculteurs congolais semblent des mesures incontournables.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net