Un nouveau déferlement judiciaire se prépare autour de l’écrivain et politologue Charles Onana. Ce dernier, dont les travaux controversés sur le génocide rwandais et les conflits dans la région des Grands Lacs ont suscité d’innombrables débats, se retrouve maintenant face à une plainte déposée par plusieurs organisations de défense des droits de l’homme. Ces dernières l’accusent de « négation de crime de génocide des Tutsi », notamment lié aux thèses avancées dans son livre publié en 2019 intitulé « Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise, quand les archives parlent ».
Le procès, qui se tiendra devant le tribunal correctionnel de Paris les 7, 8, 10 et 11 octobre prochain, pourrait bien être le point de départ d’une nouvelle bataille pour la liberté d’expression, avec en toile de fond des enjeux politiques et diplomatiques délicats.
La plainte vise à interdire cet ouvrage, tout en tentant de discréditer un auteur qui met en lumière des zones d’ombre sur les événements tragiques qui ont frappé le Rwanda et ses conséquences au Congo. Les plaignants cherchent ainsi à empêcher la diffusion des travaux d’Onana, qui s’appuient sur des documents officiels des Nations Unies, des États-Unis et de la France, et qui, selon certains, remet en question la version officielle du génocide. Notamment, Onana évoque une « invasion masquée du Congo-Zaïre » orchestrée par des rebelles rwandais, et un plan minutieusement élaboré après les événements de 1994.
Le colonel Luc Marchal, commandant des casques bleus de l’ONU à l’époque, sera présent en tant que témoin pour soutenir les thèses d’Onana, affirmant que sa méthode d’analyse éclaire des inconnues cruciales. En attendant, les implications de cette action en justice dépassent les frontières françaises, soulevant des questions brûlantes sur la liberté d’expression et le droit à la recherche historique.
Lesdits conflits d’intérêts se trouvent même à porter sur les pratiques du régime de Paul Kagame, souvent présenté comme un héros moderne par certains, et critiqué pour sa gestion des opposants et des voix dissonantes. Des enquêtes récentes ont mis au jour les méthodes répressives employées par le pouvoir rwandais pour museler ses détracteurs.
Alors que les yeux du monde seront rivés sur Paris, pour traiter de la légitimité des recherches d’Onana et l’usage que fait Kagame du narratif autour du génocide, une question demeure : les défenseurs des droits de l’homme oseront-ils enfin remettre en question les actes de l’Etat rwandais, alors que leurs propres objectifs semblent pourtant liés par des intérêts diplomatiques bien plus complexes que la simple lutte pour la vérité ?
Nul doute, cette affaire n’est pas uniquement une question judiciaire, mais un acte révélateur des luttes de pouvoir qui se jouent à l’échelle internationale, où chaque voix, chaque livre, pourrait faire pencher la balance.