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Cessez-le-feu à l’Est : Quand Kinshasa dialogue avec le M23, stratégie ou reddition déguisée ?

Dans un contexte où les rumeurs et les interprétations contradictoires fusent autour des récentes déclarations gouvernementales, Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement congolais, apporte une lumière froide sur les négociations avec l’Alliance fleuve Congo/M23. Une communication conjointe, qualifiée de « rupture stratégique » par certains observateurs, s’inscrit en réalité dans une séquence diplomatique tracée depuis des mois. Le ministre a martelé, lors d’une conférence de presse à Kinshasa, que cette initiative n’est ni un revirement ni une capitulation, mais l’aboutissement logique d’un processus multilatéral épineux.

« Nous ne pouvons pas faire de paix sans compromis », a déclaré Muyaya, rappelant l’adhésion de la RDC aux cadres de Luanda et de Doha. Une formule qui résume à elle seule le dilemme congolais : comment concilier la fermeté affichée contre « l’agression rwandaise » – selon la terminologie officielle – et les impératifs pragmatiques d’un cessez-le-feu durable ? Le gouvernement joue ici un double jeu périlleux, tentant de préserver sa crédibilité nationale tout en répondant aux pressions internationales pour une désescalade.

Derrière les déclarations lénifiantes sur le « dialogue inclusif », se cachent des calculs géopolitiques complexes. Le ministre n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler les récentes sanctions américaines, belges et britanniques contre des responsables rwandais et rebelles du M23 – preuve selon lui de l’efficacité de la diplomatie congolaise. Mais jusqu’où cette stratégie de dialogue pourra-t-elle contenir les velléités expansionnistes attribuées à Kigali ? La référence aux résolutions 2773 de l’ONU et aux feuilles de route de la SADC-EAC sonne comme un rappel à l’ordre aux partenaires internationaux : Kinshasa exige une symétrie dans l’application des pressions diplomatiques.

Le cœur du dispositif réside dans ce que Muyaya appelle « la responsabilisation des acteurs ». Une formule choc qui cache mal les tensions sous-jacentes. Comment dialoguer avec un groupe armé que Kinshasa considère comme une proxynémie du Rwanda, tout en maintenant le cap sur la restauration de l’autorité de l’État ? Les récentes annonces de cessez-le-feu immédiat et de condamnation des discours de haine répondent partiellement à cette équation. Reste que le vrai test se jouera sur le terrain : les populations de Goma et du Nord-Kivu croiront-elles à cette « dynamique de paix » tant promise ?

La posture de Felix Tshisekedi, présenté en architecte de cette nouvelle phase, interroge. En acceptant des pourparlers directs avec le M23 – qualifiés de « francs et constructifs » – le président congolais prend un risque calculé. Certains y verront une nécessaire pragmatisme, d’autres une entorse dangereuse à la doctrine de « zéro impunité ». Le ministre Loando, présent aux côtés de Muyaya, a insisté sur « l’attachement à l’intégrité territoriale », comme pour conjurer les critiques. Mais dans l’Est congolais meurtri, où les cycles de violence ressemblent à une malédiction historique, la patience des populations a des limites.

Au-delà des déclarations optimistes, persiste une question cruciale : ce processus saura-t-il s’attaquer aux racines économiques du conflit, notamment le contrôle des minerais stratégiques ? Les métaphores martiales (« jouer gros », « échec fragilisant ») employées par les officiels contrastent avec l’absence de feuille de route claire sur ce point. La communauté internationale, souvent critiquée pour son attentisme, devra-t-elle sortir son portefeuille pour consolider les avancées ?

Alors que les prochaines semaines s’annoncent déterminantes, un fait demeure : aucune paix durable ne naîtra sans une véritable réconciliation transfrontalière. Le défi pour Kinshasa sera de transformer ces pourparlers techniques en momentum politique – sans céder aux mirages d’une normalisation prématurée avec Kigali. Dans ce jeu d’échecs régional où chaque mouvement est scruté, la RDC parviendra-t-elle à faire des sanctions internationales un levier plutôt qu’un alibi ? La réponse se nichera dans les prochaines décisions du Conseil de sécurité et… dans les réactions imprévisibles du terrain.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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