Dans un contexte où les défis d’urbanisation et de développement territorial en RDC prennent des allures de casse-tête institutionnel, le ministre d’État chargé de l’Aménagement du territoire, Guy Loando, a brandi ce jeudi 24 avril l’étendard de la planification rigoureuse. Face à un parterre de journalistes à Kinshasa, coanimant un briefing aux côtés de Patrick Muyaya, son homologue de la Communication, Loando a martelé une antienne désormais familière : « Le respect des plans d’aménagement est la clé de voûte du développement national. » Une déclaration qui sonne comme un rappel à l’ordre, tant les projets inachevés ou anarchiques parsèment le paysage congolais.
Le ministre ne s’est pas contenté de psalmodier des principes généraux. Il a mis en avant l’opérationnalisation récente d’outils structurants, dont ce « guide méthodologique de l’aménagement du territoire » présenté comme un vade-mecum pour les Entités territoriales décentralisées (ETD). « Sans planification, point de salut industriel ou agricole », a-t-il asséné, transformant la salle de conférence en chambre d’écho pour sa vision technocratique. Mais derrière les concepts se cache une question brûlante : ces schémas survivront-ils aux réalités locales, souvent rongées par l’improvisation et les luttes d’influence ?
L’adoption récente du schéma national d’aménagement du territoire, validé mercredi dernier lors d’un atelier ministériel, cristallise autant d’espoirs que de scepticismes. Loando y voit un « outil d’orientation incontournable », une boussole pour guider les investisseurs et les gouverneurs provinciaux. Pourtant, l’histoire récente de la RDC regorge de plans ambitieux réduits à l’état de rapports poussiéreux. Comment croire que celui-ci échappera au sort des précédents, alors que même les actualités régionales RDC relatent quotidiennement des conflits fonciers ou des infrastructures abandonnées à mi-construction ?
Le ministre joue habilement la carte de l’institutionnalisation, arguant que les structures de suivi mises en place garantiront l’application des directives. Une rhétorique qui séduit sur le papier, mais qui bute sur un terrain miné par des enjeux politiques complexes. À Goma comme à Lubumbashi, les autorités locales sauront-elles résister à la tentation de contourner ces plans pour privilégier des intérêts particuliers ? La question reste en suspens, tant le millefeuille administratif congolais complique l’harmonisation des actions.
Si Loando insiste sur la nécessité de « plans locaux d’aménagement » adaptés à chaque territoire, il évite soigneusement d’aborder les écueils pratiques. Budgets insuffisants, corruption endémique, manque criant d’expertise technique : autant de défis que le guide méthodologique ne résoudra pas par incantation. L’analyse politique RDC ne peut ignorer ces angles morts, sous peine de verser dans le wishful thinking institutionnel.
En filigrane de ce discours se dessine un enjeu plus stratégique pour le gouvernement : redorer son blason en matière de gouvernance territoriale à l’approche d’échéances électorales cruciales. Le ministre d’État, en technocrate averti, semble conscient que l’échec de cette réforme fragiliserait non seulement sa propre position, mais aussi la crédibilité de l’exécutif face aux partenaires internationaux. Les prochains mois diront si ces schémas d’aménagement rejoindront le panthéon des bonnes intentions ou s’imposeront comme de véritables leviers de transformation. L’équation est périlleuse, mais l’urgence du développement ne permet plus les faux-fuyants.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
