Dans un geste symbolique marquant le renforcement des liens économiques en Afrique de l’Est et Centrale, Air Tanzania a inauguré ce vendredi 25 avril sa nouvelle liaison aérienne directe entre Kinshasa et Dar es Salaam. Un Airbus A330, porteur des couleurs de la compagnie tanzanienne, a atterri à l’aéroport de N’djili sous les applaudissements des officiels congolais et tanzaniens. Cet événement, présidé par le vice-Premier ministre congolais des Transports, Jean-Pierre Bemba, et son homologue tanzanien Mbarawa Makame, ouvre un nouveau chapitre dans la connectivité régionale.
Quatre vols hebdomadaires sont prévus sur cet axe, selon les déclarations recueillies par l’Agence congolaise de presse (ACP). Mais l’ambition dépasse les frontières africaines : la compagnie envisage d’étendre ses ailes vers l’Asie, ciblant notamment la Chine et les Émirats Arabes Unis. Une stratégie qui positionne la RDC comme « plaque tournante du trafic aérien continental », selon un expert en logistique interrogé par nos services.
La délégation tanzanienne, incluant le directeur général d’Air Tanzania, a souligné lors d’une conférence de presse la « détermination à servir l’Afrique », avec un accent particulier sur le marché congolais. Un choix logique : avec ses 100 millions d’habitants et ses ressources minières stratégiques, la RDC représente un « bassin de croissance inexploité » pour les transporteurs régionaux. Les échanges commerciaux entre les deux pays, estimés à 500 millions USD en 2023 par la Banque centrale congolaise, pourraient connaître une progression de 15% grâce à cette nouvelle route aérienne.
Sur le plan technique, le choix de l’Airbus A330 – appareil long-courrier capable de transporter jusqu’à 300 passagers – révèle une vision à moyen terme. « Cette capacité permet non seulement de répondre à la demande actuelle, mais anticipe aussi l’augmentation du trafic liée aux investissements miniers chinois dans le Copperbelt », analyse un économiste spécialiste des transports à l’Université de Kinshasa. Les secteurs minier et agricole congolais, piliers de l’économie RDC, devraient bénéficier d’une logistique accélérée pour leurs exportations.
Reste à savoir comment cette offensive aérienne s’articulera avec les intérêts des compagnies locales. Aucun partenariat n’a été évoqué avec Congo Airways, la compagnie nationale en difficulté financière depuis 2020. Certains observateurs y voient un « signal d’alarme » pour le transport aérien congolais, appelé à se restructurer face à cette concurrence régionale agressive.
Sur le plan géopolitique, ce rapprochement intervient dans un contexte de recomposition des alliances en Afrique subsaharienne. La Tanzanie, historiquement proche des partenaires asiatiques, semble vouloir jouer un rôle d’intermédiaire entre la RDC et ses investisseurs étrangers. Une manière de contrer l’influence croissante des compagnies éthiopiennes ou kenyanes sur le continent ? Les prochains mois apporteront des éléments de réponse, au rythme des rotations de l’A330 entre les deux capitales.
Pour les usagers congolais, l’ouverture de cette ligne signifie surtout une alternative concrète aux vols transitant par Nairobi ou Addis-Abeba. Un gain de temps non négligeable – environ 4 heures sur un trajet Kinshasa-Dubaï – et des coûts potentiellement réduits grâce à la concurrence. Reste à voir si les promesses se concrétiseront : le prix moyen du billet (estimé à 800 USD aller-retour) reste prohibitif pour une large partie de la population.
Cet événement s’inscrit dans la dynamique des actualités économiques RDC récentes, marquées par plusieurs accords transfrontaliers. Il intervient deux semaines après l’annonce du projet de corridor ferroviaire Lobito-Dar es Salaam, financé par des capitaux américains et européens. Autant d’initiatives qui dessinent progressivement une nouvelle carte des échanges africains, où la RDC occupe une position centrale mais encore fragile.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net