Dans un contexte de tensions persistantes à l’Est de la République Démocratique du Congo, la signature d’une déclaration conjointe entre le gouvernement congolais et le mouvement rebelle M23/AFC suscite un mélange d’espoir prudent et de scepticisme. Sous médiation qatarie, les deux parties ont convenu, mercredi 23 avril 2025, d’« œuvrer à la conclusion d’une trêve » devant mener à un cessez-le-feu effectif. Une annonce saluée par le Rwanda, le Qatar et la Belgique, mais qui soulève des questions sur la durabilité de cette dynamique.
« Cette déclaration constitue un pas important, voire décisif », a déclaré Olivier Ndahungire, ministre rwandais des Affaires étrangères, tout en insistant sur la nécessité d’une « mise en application en toute bonne foi ». Une formulation qui rappelle subtilement les accusations récurrentes de Kinshasa contre Kigali, accusé de soutenir le M23. Le Rwanda, habile dans l’art de la diplomatie équivoque, semble ici jouer à la fois l’arbitre et l’acteur d’un conflit dont il nie officiellement toute implication.
Du côté qatari, le ton est résolument optimiste. Le ministère des Affaires étrangères a salué sur X « les efforts de collaboration » tout en encourageant les parties à poursuivre un dialogue « conforme aux aspirations du peuple congolais à la paix ». Un rôle de médiateur qui consolide l’influence de Doha dans les actualités internationales RDC, mais interroge sur les contreparties invisibles d’une diplomatie souvent accusée de pragmatisme mercantile.
La Belgique, ancienne puissance coloniale, apporte également son soutien. Maxime Prévôt, vice-Premier ministre belge, a annoncé une visite dans la région pour « exprimer [son] plein appui » aux efforts de paix. Une démarche louable, mais qui ne suffira pas à effacer le passif historique d’un pays dont les interventions en RDC oscillent entre remords postcolonial et realpolitik.
Une trêve fragile sur fond de défis structurels
Si les déclarations se multiplient, les obstacles concrets demeurent. Le M23, dont les offensives ont déstabilisé le Nord-Kivu depuis 2022, acceptera-t-il de renoncer définitivement aux armes ? Le gouvernement congolais, fragilisé par des divisions internes, parviendra-t-il à incarner un partenaire crédible ? Et que pèseront ces engagements face aux enjeux économiques sous-jacents – minerais, terres, contrôle des frontières – qui alimentent le conflit depuis des décennies ?
Les pourparlers de Doha, bien que présentés comme une avancée, révèlent aussi les limites des solutions externes. Le Qatar, absent traditionnel des actualités régionales RDC, peut-il durablement remplacer les mécanismes de l’Union africaine ou de la SADC ? La question est d’autant plus cruciale que les initiatives se chevauchent : le Rwanda évoque d’autres processus en cours pour avril 2025, sans précision. Une superposition qui risque de diluer les efforts plutôt que les renforcer.
Kinshasa sous pression : entre urgence sécuritaire et attentes populaires
Pour le président congolais, cette trêve représente un pari risqué. Après des mois de rhétorique martiale contre le Rwanda et les rebelles, accepter une médiation qataro-rwandaise pourrait être perçu comme un revirement. L’opposition ne manquera pas de dénoncer une capitulation déguisée, surtout si les discussions n’aboutissent pas à un désarmement tangible du M23. La crédibilité du pouvoir en sortirait durablement écornée.
Pourtant, la population de Goma et des zones concernées, épuisée par des années de violence, réclame avant tout la paix. Les actualités locales RDC relatent quotidiennement les déplacements massifs de civils, les exactions et l’effondrement des services publics. Dans ce contexte, même une trêve précaire apparaît comme une bouffée d’oxygène.
Vers un printemps diplomatique ou un énième mirage ?
La suite dépendra de la capacité des signataires à transformer les mots en actes. Les prochains jours verront-ils une réduction des combats, ou assistera-t-on à une reprise des hostilités sous couvert de violations mutuelles ? Les observateurs notent que le M23, malgré des gains territoriaux significatifs, pourrait avoir intérêt à une pause pour consolider ses positions. Le gouvernement, lui, chercherait à gagner du temps avant des échéances électorales cruciales.
Reste que cette initiative, si elle échoue, risque d’aggraver la méfiance entre les parties. Comme le souligne un diplomate sous couvert d’anonymat : « Chaque échec des pourparlers renforce les factions les plus belliqueuses des deux côtés. » Un avertissement qui rappelle que dans les analyses politiques RDC, l’espoir doit toujours composer avec le poids de l’histoire.
Alors que la Belgique, le Qatar et le Rwanda affichent leur optimisme, les Congolais attendent des preuves. Car comme le dit un adage local : « La paix ne se signe pas dans les hôtels climatisés de Doha, mais sur les collines du Kivu. » L’avenir dira si cette déclaration conjointe marque un tournant ou simplement une pause dans l’interminable tragédie de l’Est congolais.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net