Ce mardi 22 avril, le fleuve Congo a encore englouti des vies. Un canot rapide reliant Brazzaville à Kinshasa a chaviré, laissant cinq personnes portées disparues. Parmi elles, quatre Congolais de la rive kinoise et un autre de la capitale congolaise voisine. Une tragédie qui résonne comme un sinistre refrain dans cette zone pourtant vitale pour les échanges entre les deux pays.
« Le canot a tangué brusquement avant de se retourner. En quelques secondes, tout a basculé », témoigne un rescapé sous le choc, joint par nos soins. Les survivants, trempés et hagards, décrivent une scène de panique où les cris se mêlaient au grondement du fleuve. Comment en est-on arrivé là ? La question hante les familles des disparus, qui scrutent désormais les berges avec l’espoir ténu d’une retrouvaille.
Les opérations de secours, coordonnées entre les autorités des deux rives, butent sur un défi de taille : la puissance des courants du fleuve Congo, deuxième plus puissant au monde après l’Amazone. « Les recherches sont complexes, mais nous mobilisons tous les moyens disponibles », confie une source sécuritaire kinoise sous couvert d’anonymat. Une course contre la montre où chaque minute compte pour sauver des vies.
Derrière ce drame individuel se profile un problème structurel bien connu des usagers du fleuve. Les embarcations précaires, souvent surchargées, naviguent sans respect des normes de sécurité élémentaires. « Qui contrôle réellement ces canots ? Qui forme les pilotes ? », s’insurge un activiste de la société civile spécialisé dans les transports fluviaux. Une interrogation qui renvoie aux failles de gouvernance dans la gestion des voies navigables, pourtant cruciales pour l’économie RDC.
Ce naufrage relance le débat sur l’urgence d’un pont entre les deux capitales, projet pharaonique évoqué depuis des décennies. « Combien de morts faudra-t-il encore pour que les dirigeants passent des promesses aux actes ? », lance amèrement un commerçant transfrontalier. Entre les actualités politiques RDC et la réalité des populations, le fossé semble se creuser un peu plus chaque jour.
Les familles des disparus, elles, vivent un calvaire parallèle. À Maluku, sur la rive kinoise, une mère serre contre elle la photo de son fils de 24 ans. « Il allait chercher des médicaments à Brazzaville pour sa petite sœur malade… », murmure-t-elle, les yeux rivés sur le fleuve implacable. Un drame humain qui rappelle cruellement la vulnérabilité des citoyens face aux carences infrastructurelles.
Cette nouvelle tragédie fluviale interroge plus largement sur la gestion des risques en RDC. Alors que le pays mise sur le développement des technologies et innovations RDC, les transports restent prisonniers de méthodes archaïques. Un paradoxe qui coûte des vies humaines et entrave le décollage économique tant attendu.
Alors que les recherches se poursuivent, une évidence s’impose : le fleuve Congo, artère vitale de la région, mérite mieux qu’un statut de cimetière aquatique. Entre renforcement des contrôles, modernisation des transports et accélération des projets structurants, les solutions existent. Reste à savoir si elles figureront enfin à l’agenda des décideurs politiques des deux rives.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd