Dans un contexte où l’exploitation minière en République Démocratique du Congo (RDC) reste à la fois un moteur économique et un catalyseur de tensions, l’annonce d’un partenariat stratégique entre Kinshasa et Washington suscite un espoir mesurable. Le collectif « Voix du Kivu pour la Patrie », représentant les notables du Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri et Maniema, a salué cette initiative gouvernementale ce mercredi 23 avril. Une collaboration présentée comme un rempart contre l’instabilité chronique dans l’Est du pays.
« Cette alliance pourrait réécrire l’équation économique de nos provinces », affirme John Cebwere, porte-parole du collectif. Les chiffres justifient cet optimisme : selon la Banque Mondiale, près de 70% des conflits armés dans la région sont liés à la gestion des ressources naturelles. En canalisant l’exploitation via des circuits sécurisés et transparents, le gouvernement vise une double victoire : tarir le financement des groupes armés et booster les recettes publiques.
Le cœur de l’accord ? Un renforcement des chaînes de valeur des minéraux critiques – cobalt, coltan, or – dont la RDC détient jusqu’à 60% des réserves mondiales. « Imaginez un pipeline où chaque gramme de minerai serait tracé, depuis la mine jusqu’à l’exportation », illustre un expert minier sous couvert d’anonymat. Un dispositif qui, s’il fonctionne, pourrait augmenter de 20% les revenus miniers de l’État d’ici 2026, selon des projections du FMI.
Mais pourquoi les États-Unis investissent-ils dans ce dossier épineux ? Au-delà des enjeux humanitaires, Washington cherche à sécuriser son approvisionnement en minerais stratégiques pour la transition énergétique. Un calcul géopolitique qui n’échappe pas à Kinshasa : « Nous transformons une dépendance historique en levier de souveraineté », analyse un conseiller du ministère des Mines. La RDC exigerait notamment un transfert de technologies et un ancrage local des infrastructures de transformation.
Sur le terrain, les attentes sont palpables. À Goma et Bukavu, des chefs locaux évoquent un « dividende de paix » potentiel : « Si les mines ne financent plus les kalachnikovs, nos jeunes retrouveront le chemin des champs et des écoles », espère un notable du Sud-Kivu. Restent des défis colossaux : comment impliquer les creuseurs artisanaux ? Quel mécanisme de contrôle pour éviter les détournements ?
Certains observateurs tempèrent l’enthousiasme. « Les partenariats miniers ont souvent nourri des espoirs démesurés », rappelle le politologue congolais Arsène Kande. Il cite l’exemple du contrat sino-congolais Sicomines, dont seuls 15% des promesses d’infrastructures ont été tenues. Pour éviter un nouvel échec, la société civile exige une transparence radicale sur les clauses de l’accord.
L’enjeu dépasse l’économie : c’est l’unité nationale qui se joue dans l’Est congolais. En intégrant les notables locaux dans le processus, le gouvernement tente de désamorcer les griefs historiques des provinces minières. Une stratégie payante ? « Lorsque les populations verront des cliniques et des routes sortir de terre, la légitimité de l’État suivra », prédit John Cebwere. La prochaine étape : concrétiser avant les élections de 2026 pour crédibiliser le discours développementaliste du pouvoir.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net