La situation humanitaire dans le territoire de Lubero, au Nord-Kivu, prend une tournure critique. La société civile locale a tiré la sonnette d’alarme ce mercredi 23 avril face à une hausse inquiétante des cas de malnutrition, particulièrement chez les enfants et les femmes de Njiapanda. Dix nouveaux cas sont désormais enregistrés chaque mois dans cette localité de la zone de santé de Biena, contre quatre il y a à peine quelques mois. Une progression qui interroge sur l’impact des conflits armés sur les populations civiles.
Comment en est-on arrivé à ce seuil d’urgence ? Les récentes offensives entre les FARDC, les rebelles du M23 et les ADF ont provoqué un déplacement massif des populations. Privées de leurs terres agricoles et de leurs moyens de subsistance, des familles entières survivent dans des conditions précaires. « Ces personnes n’ont plus accès à leurs champs ni à leurs ressources alimentaires habituelles », explique Merveille Mhindo Kavughu, nutritionniste à la zone de santé d’Annualité.
Les conséquences sont visibles : retard de croissance chez les enfants, carences nutritionnelles sévères chez les femmes enceintes, et augmentation des maladies opportunistes. Pour mieux comprendre l’ampleur du phénomène, imaginez un enfant sur cinq dans la région incapable de recevoir un repas équilibré plus d’une fois par jour. Une bombe à retardement sanitaire que dénoncent les acteurs locaux.
Face à cette crise humanitaire, les appels se multiplient. « Nous avons besoin d’une intervention rapide des organisations humanitaires pour distribuer des suppléments nutritionnels et relancer l’agriculture locale », insiste le Dr Kavughu. Le spécialiste propose une approche innovante : mobiliser les écoles proposant des formations en nutrition pour détecter précocement les cas critiques. Une manière d’impliquer la communauté tout en renforçant les capacités locales.
Mais les défis restent immenses. Les routes impraticables en saison des pluies, l’insécurité persistante et le manque de centres de santé équipés compliquent l’accès aux populations vulnérables. La zone de santé de Biena, déjà fragilisée par des années de conflits, manque cruellement de ressources médicales adaptées à la prise en charge de la malnutrition aiguë.
Que peuvent faire les autorités et la communauté internationale ? Les experts recommandent trois actions prioritaires : un pont aérien pour acheminer des aliments thérapeutiques, la sécurisation des axes routiers pour permettre l’accès humanitaire, et un programme cash-for-work pour relancer l’économie locale. La société civile du Nord-Kivu insiste également sur l’importance d’intégrer des bilans nutritionnels systématiques dans les centres de déplacés.
Cette crise rappelle cruellement l’interdépendance entre sécurité alimentaire et stabilité politique en RDC. Alors que les regards se tournent vers les récentes avancées militaires contre les groupes armés, il ne faudrait pas oublier cette urgence silencieuse qui mine l’avenir d’une génération entière. La réponse à apporter devra être à la mesure des enjeux : rapide, coordonnée, et axée sur des solutions durables.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net