Alors que la République Démocratique du Congo (RDC) cherche à accélérer son développement économique, une question revient comme un leitmotiv : comment transformer le potentiel du pays en réalité tangible ? La réponse pourrait bien se nicher dans les réformes éducatives. Lors du 9ème Salon du Développement dédié aux corridors, tenu à Lubumbashi, le ministre de la Formation Professionnelle, Marc Ekila, a dévoilé une feuille de route ambitieuse pour résoudre l’épineuse inadéquation entre formations et emplois.
« Nous avons conçu la formation professionnelle à son niveau le plus bas, limitée aux centres d’apprentissage de métiers. Pourtant, les grands investisseurs exigent une main-d’œuvre qualifiée », a-t-il martelé devant un parterre d’acteurs publics, privés et académiques. Un constat sans appel qui résonne dans un pays où seulement 10% des jeunes diplômés trouvent un emploi en phase avec leurs compétences, selon des données sectorielles.
La politique nationale de formation professionnelle, présentée comme une « boussole stratégique », vise à anticiper les besoins en métiers d’avenir. « Dans le secteur minier par exemple, nous identifions dès aujourd’hui les compétences nécessaires pour les cinq prochaines années », explique le ministre. Une approche sectorielle qui s’étendra à la foresterie dans l’Équateur ou aux infrastructures dans le Haut-Katanga, en adéquation avec le plan national de développement axé sur les grands travaux.
Des centres spécialisés par zone économique
L’innovation majeure ? La décentralisation des compétences. « Chaque région aura ses centres de formation alignés sur ses spécificités économiques », précise Marc Ekila. Lubumbashi, plaque tournante minière, pourrait ainsi abriter des académies dédiées à l’extraction responsable, tandis que Kisangani développerait des cursus en gestion forestière durable. Une manière de coller aux actualités régionales RDC où chaque territoire nourrit des ambitions économiques distinctes.
Mais comment garantir la qualité des formations ? Le ministre évoque un double mécanisme : « Valorisation des acquis de l’expérience pour les travailleurs non titulaires, et montée en gamme des formateurs ». Une révolution culturelle dans un pays où près de 60% de l’économie relève du secteur informel, selon la Banque Centrale du Congo.
Quand l’éducation devient levier d’investissement
Cette refonte éducative s’inscrit dans une logique plus large de séduction des investisseurs. « Les corridors de développement ne seront viables qu’avec une main-d’œuvre qualifiée », insiste un participant au salon. Un argument de poids alors que la RDC négocie plusieurs partenariats stratégiques dans les infrastructures économiques RDC.
Reste à surmonter les défis pratiques. Comment équiper des centres de formation dans des zones reculées ? Quelle articulation avec l’enseignement supérieur ? Autant de questions qui ont animé les débats à l’Expo Béton 9, devenu laboratoire d’idées pour les nouvelles congolaises en matière d’éducation.
Alors que le salon se clôturait samedi dernier, une certesse émerge : la réussite de cette politique nécessitera un budget conséquent et une collaboration public-privé accrue. Dans un contexte où seulement 8% du budget national est alloué à l’éducation (moins de la moitié des recommandations de l’UNESCO), le chemin s’annonce semé d’embûches. Mais comme le conclut un enseignant présent à l’événement : « C’est la première fois qu’on parle de formation professionnelle non pas comme une roue de secours, mais comme un moteur de développement ». Une lueur d’espoir pour les millions de jeunes Congolais en quête d’avenir.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd