Dans une région où l’accès à l’éducation reste un défi quotidien, un vent d’espoir souffle sur l’institut Mabasele de Ngite, à 15 km de Beni. La MONUSCO vient d’y investir 50 000 USD pour réhabiliter et équiper six salles de classe abandonnées depuis quatre ans. Une initiative qui interroge : peut-elle vraiment transformer le destin des jeunes filles du Nord-Kivu tout en consolidant la paix sociale ?
Un Projet QIPS aux Enjeux Multiples
Ce projet s’inscrit dans les « Quick Impact Projects » de la MONUSCO, conçus pour répondre rapidement aux besoins des communautés. Au-delà des murs repeints et des portes installées, l’objectif est clair : favoriser la mixité scolaire grâce à une approche de « masculinité positive ». Comment ? En créant des espaces où filles et garçons apprennent à cohabiter, loin des stéréotypes qui freinent souvent la scolarisation des adolescentes.
Ngite : Une Communauté Mobilisée mais Fragilisée
L’histoire de ces salles de classe révèle une réalité criante. En 2019, les habitants de Ngite avaient bâti deux bâtiments de trois classes chacun… avant de se heurter au mur des réalités économiques. « Nous n’avions pas les moyens de terminer les travaux ni d’acheter le matériel », explique Mathieu Kamable Sumaili, préfet des études. Résultat : une école pouvant accueillir 1 000 élèves n’en scolarise aujourd’hui qu’une centaine.
Éducation et Paix : Un Lien Indéniable
« Cette collaboration avec la MONUSCO est vitale pour rétablir la paix », insiste le préfet. Un discours qui résonne particulièrement dans cette province en proie aux conflits armés. L’argument est implacable : une école fonctionnelle réduit les risques de recrutement des jeunes par les groupes armés. Gervais Kakule, élève bénéficiaire, abonde : « Je demande aux autres jeunes de protéger cette école. La MONUSCO nous aide, nous devons être de bons citoyens. »
Autonomisation des Filles : Pari ou Réalité ?
Si les effectifs devraient augmenter, la vraie question reste celle de la pérennité. Le projet inclut-il des mécanismes contre les abandons scolaires précoces ? Des programmes de sensibilisation des parents ? Si les détails manquent, l’intention affichée marque un pas vers l’ODD 4 (éducation inclusive). Reste à voir comment cette « masculinité positive » se traduira concrètement dans les salles de classe congolaises.
Nord-Kivu : Un Laboratoire Éducatif ?
Avec ce projet, la MONUSCO teste une approche holistique où éducation rime avec cohésion sociale. Un modèle qui pourrait inspirer d’autres régions de RDC, à condition que les fonds soient utilisés avec transparence. Car dans un pays où les promesses de développement peinent à se concrétiser, chaque initiative devient un test de crédibilité pour les partenaires internationaux.
Alors que les travaux démarrent, certains s’interrogent : et si demain, d’autres écoles de Kinshasa à Goma réclamaient le même traitement ? La réponse dépendra de l’impact réel de ce QIPS sur le taux de scolarisation… et surtout sur l’émancipation des futures diplômées de Mabasele.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net
