Dans le territoire de Rutshuru, au Nord-Kivu, une crise salariale secoue le secteur éducatif. Depuis deux mois, les enseignants des quatre sous-divisions de la région attendent désespérément leur salaire. Malgré les assurances du gouvernement congolais concernant le paiement via la Caritas et les applications mobiles de transfert d’argent, rien n’a été versé. Comment ces éducateurs peuvent-ils continuer à enseigner dans de telles conditions ?
Un enseignant, sous couvert d’anonymat, exprime son désarroi : « Si le gouvernement fait le nécessaire, pourquoi la Caritas tarde-t-elle à payer nos salaires ? Deux mois impayés, c’est trop. Nous avons complété les fiches. Ça fait un mois sans suite. Nous sommes délaissés. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer. Déjà deux mois, bientôt trois mois impayés ». Une situation intenable pour ces pères et mères de famille qui peinent à subvenir aux besoins de leurs proches.
Habituellement, la Caritas prend en charge le paiement des enseignants, mais actuellement, elle ne semble opérationnelle que dans certaines provinces éducationnelles. Face à cette impasse, Dieudonné Rusangiza, président de l’intersyndicale, annonce des mesures radicales : « Deux mois sans salaire, bientôt trois mois, c’est trop pour ces pères et mères de famille qui n’en peuvent plus. C’est ainsi qu’ils ont décidé d’organiser une marche pacifique pour dénoncer ce mauvais traitement et exiger de l’État qu’il paie leurs arriérés de salaire. Après cette marche, les enseignants seront obligés d’arrêter les cours, car ils sont vraiment épuisés ».
En réponse, Luc Gbaweza, directeur de la province éducationnelle du Nord-Kivu I, tente de rassurer. Il explique que l’équipe de la Caritas était récemment en mission à Inongo et qu’elle est désormais de retour à Goma. Selon lui, la priorité est désormais de finaliser les paiements via mobile money pour les enseignants de Rutshuru et Masisi. Il ajoute que les banques responsables des paiements à Goma et Nyiragongo devraient également utiliser ce système sous peu. Mais ces promesses suffiront-elles à calmer la colère grandissante ?
Cette crise trouve son origine dans la fermeture des banques à Goma, conséquence de l’occupation de la ville par des groupes rebelles, notamment l’AFC/M23. Le gouvernement avait pourtant promis de garantir le paiement des enseignants dans ces zones instables. En mars, la ministre de l’Éducation nationale, Raïssa Malu, avait assuré que Kinshasa prendrait en charge ces salaires, malgré les difficultés liées à la fermeture des banques. Pourtant, sur le terrain, les enseignants continuent de souffrir.
Cette situation met en lumière les défis persistants du système éducatif en RDC, particulièrement dans les zones en proie à l’insécurité. Alors que les enseignants de Rutshuru se préparent à une marche pacifique, la question reste entière : jusqu’à quand devront-ils attendre pour être payés ? Dans un contexte où l’éducation est déjà fragilisée par les conflits, cette crise salariale risque d’aggraver encore la situation. Les autorités congolaises parviendront-elles à trouver une solution durable pour ces éducateurs en détresse ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
