Dans un discours poignant prononcé ce lundi 31 mars à Kinshasa lors du lancement de la table ronde sur l’appropriation du GENOCOST, le Président Félix-Antoine Tshisekedi a brisé un silence assourdissant. Face à un parterre de personnalités politiques et de représentants de la société civile, le Chef de l’État a dénoncé avec une rare virulence ce qu’il qualifie de « génocide congolais », pointant du doigt le rôle central du Rwanda et du groupe armé M23/AFC dans les violences qui ensanglantent l’est de la République démocratique du Congo depuis des décennies.
« Plus de 10 millions de vies humaines, innocentes, brutalement fauchées par une violence systématique et cyclique visant des communautés entières », a déclaré le Président Tshisekedi, révélant ainsi l’ampleur d’une tragédie longtemps occultée par la communauté internationale. Ces propos, prononcés avec une gravité mesurée mais une détermination sans faille, marquent un tournant dans la narration officielle du conflit congolais. La RDC, souvent réduite à son statut de scandale géologique, révèle ici son visage le plus tragique : celui d’un peuple martyrisé.
Le timing de cette annonce n’est pas anodin. Alors que la région des Grands Lacs connaît une recrudescence des tensions, le Chef de l’État congolais semble vouloir forcer la main à la communauté internationale. « Ces actes atroces, perpétrés directement ou indirectement par certains pays voisins, en particulier le Rwanda, à travers des forces négatives qu’ils créent, ne laissent plus aucun doute quant à l’existence d’un véritable génocide », a-t-il insisté, lançant ainsi un pavé dans la mare diplomatique régionale.
La stratégie apparaît clairement : en officialisant cette lecture des événements, le gouvernement congolais cherche à obtenir une reconnaissance internationale qui permettrait d’activer des mécanismes judiciaires et politiques plus contraignants. Le Président Tshisekedi l’a d’ailleurs souligné : cette table ronde doit aboutir à « une stratégie nationale efficace pour obtenir la reconnaissance internationale du génocide commis en RDC et pour consolider une paix durable ».
Dans un registre plus mobilisateur, le Chef de l’État a appelé les forces vives du pays à maintenir leur résilience face aux défis multiformes. « Notre marche vers la vérité et la paix est semée d’embûches politiques, diplomatiques et idéologiques, mais elle est nécessaire et irréversible », a-t-il déclaré, conscient des résistances que cette nouvelle offensive diplomatique pourrait rencontrer.
Cette prise de parole intervient dans un contexte où la RDC tente de réécrire son histoire, loin des récits imposés. Le 2 août 2023, le pays avait déjà marqué les esprits en instaurant une journée nationale de commémoration pour les victimes des violences. Aujourd’hui, avec cette reconnaissance officielle du génocide congolais, le gouvernement semble déterminé à tourner une page douloureuse tout en préparant le terrain pour de futures actions judiciaires internationales.
Reste à savoir comment la communauté internationale, souvent accusée de complaisance envers Kigali, réagira à ces accusations sans précédent. Entre reconnaissance tardive et realpolitik, le dossier congolais pourrait bien devenir le prochain test de crédibilité des institutions internationales en matière de prévention des génocides.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
