Dans un contexte où les conséquences psychologiques des conflits armés pèsent lourd sur la population, le Centre Neuro-Psychopathologique (CNPP) de Kinshasa a organisé deux jours de consultations gratuites les 27 et 28 mars. Une initiative saluée comme une bouffée d’oxygène dans un pays où les troubles mentaux restent tabous. Mais comment briser les préjugés tout en répondant à l’urgence sanitaire ? Plus de 500 personnes se sont présentées devant les portes du CNPP, preuve d’un besoin criant. Le professeur Daniel Okitundu, directeur du centre, souligne le lien entre violence prolongée et santé cérébrale : « Les traumatismes de guerre génèrent des troubles anxieux, des dépressions sévères, voire des syndromes post-traumatiques. Beaucoup ignorent que ces pathologies se soignent. » Parmi les consultants, une mère de famille témoigne : « Depuis que mon fils a vu des miliciens tuer son père, il ne parle plus. J’ai tout essayé – guérisseurs, prières – avant de venir ici. » Un cas typique dans une région où seulement 2% des personnes souffrant de troubles mentaux consultent un spécialiste, selon l’OMS. Le Dr Grâce Bilungula tord le cou aux idées reçues : « Notre centre n’est pas un « hôpital de fous » ! Nous avons des neurologues, des psychothérapeutes, des assistants sociaux. La santé mentale, c’est aussi la prévention et l’accompagnement social. » Cette campagne s’inscrit dans une stratégie plus large. Alors que la RDC ne compte que 13 psychiatres pour 100 millions d’habitants, le CNPP forme 70% des professionnels du secteur. Un enjeu capital pour le système de santé congolais, d’autant que les violences dans l’Est exacerbent les besoins. Reste un défi de taille : convaincre. « Beaucoup préfèrent aller dans des églises de réveil », regrette un infirmier. Pourtant, les résultats parlent : 85% des patients suivis montrent une amélioration après six mois de traitement, selon les données du centre. À travers des actions comme celle-ci, le CNPP pose les jalons d’une prise en charge déstigmatisée de la santé mentale. Un combat qui dépasse largement le cadre médical pour toucher à la reconstruction sociale d’un pays meurtri.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net