Dans un silence assourdissant, une crise sanitaire se profile à Kasindi Lubiriha, au cœur du Nord-Kivu. L’orphelinat « Tukinge Yatima », refuge de près de 500 enfants, affronte une flambée de rougeole qui menace de se transformer en tragédie humaine. Quinze cas confirmés en trois mois, des lits surpeuplés, des stocks de médicaments épuisés : le tableau décrit par Des Anges Maliro, responsable du centre, glace le sang. « Quand un enfant tousse, dix autres respirent le même air vicié », confie-t-elle, les traits marqués par l’épuisement. La zone de santé rurale de Mutwanga, déjà fragilisée par des années de conflits, voit ses structures médicales dépassées. Les équipes soignantes, réduites à l’impuissance par le manque de traitements, lancent un cri d’alarme vers Kinshasa et la communauté internationale. Cette épidémie révèle une double urgence : sanitaire et humanitaire. Comment expliquer que dans une région sous perfusion d’ONG, des vaccins essentiels manquent à l’appel ? La promiscuité dans les dortoirs – jusqu’à quatre enfants par lit – crée un terreau idéal pour la contagion. « Chaque nouveau cas nous rapproche du point de rupture », avertit un médecin sous couvert d’anonymat. Les appels à l’aide se heurtent au mur des réalités congolaises. Si MSF et l’Unicef maintiennent des programmes dans la région, leurs ressources s’étirent comme un élastique face à l’ampleur des besoins. La Croix-Rouge locale tente de coordonner une réponse, mais le temps presse : le taux de létalité de la rougeole en RDC dépasse déjà 2% dans certaines zones. Cette crise localisée pose une question plus vaste : le système de santé congolais peut-il encore prévenir les catastrophes sanitaires prévisibles ? Alors que les regards se tournent vers les urnes en cette période électorale, des centaines d’enfants orphelins luttent pour survivre à une maladie évitable. Qui viendra en aide à ces invisibles de Kasindi Lubiriha avant que le bilan ne devienne irréversible ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net