Une épidémie de rougeole menace la stabilité sanitaire de l’orphelinat Tukinge Yatima, situé dans la zone frontalière stratégique de Kasindi Lubiriha. Avec quinze cas confirmés en six semaines et près de 500 enfants exposés, cette crise révèle les failles d’un système de santé déjà fragilisé par des années de conflits dans le Nord-Kivu. « La promiscuité transforme chaque lit en foyer contagieux : trois à quatre enfants par matelas, zéro isolement possible », alerte Des Anges Maliro, responsable du centre. Ses appels résonnent comme un SOS face à la pénurie de traitements et au risque de propagation exponentielle. Les équipes médicales locales, débordées, pratiquent une médecine de triage. « On priorise les cas graves, mais sans antiviraux ni vaccins en quantité suffisante, c’est un combat perdu d’avance », confie un médecin sous couvert d’anonymat. La situation expose cruellement les limites de la gratuité des soins instaurée dans les structures publiques de la région. En toile de fond, un paradoxe congolais : la province du Nord-Kivu, riche en minerais stratégiques, voit ses enfants mourir de maladies évitables. Le dernier rapport de l’OMS sur la couverture vaccinale dans le Kivu (62% en 2023) prend ici tout son sens. Les ONG internationales présentes dans la zone restent étrangement silencieuses. MSF, pourtant active à Beni voisin, n’a pas répondu à nos sollicitations. Seule la Croix-Rouge locale tente de colmater les brèches avec des moyens dérisoires. Cette crise localisée pourrait-elle déclencher une alerte régionale ? Les spécialistes rappellent que le virus de la rougeole possède un taux de contagiosité sept fois supérieur à celui du Covid-19. Dans un contexte de mobilité transfrontalière intense avec l’Ouganda, les enjeux dépassent largement le cadre humanitaire.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net