La situation dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) continue de susciter des inquiétudes, non seulement d’un point de vue sécuritaire, mais également sous l’angle économique. Des chiffres percutants ont été révélés par Jules Alingete Key, Inspecteur Général des Finances et Chef de service à l’Inspection Générale des Finances (IGF), lors de son intervention à l’émission Fauteuil Blanc sur Télé 50. Selon lui, l’occupation des villes stratégiques de Goma (Nord-Kivu) et Bukavu (Sud-Kivu) par la rébellion du M23, soutenue par le Rwanda, entraîne des pertes conséquentes pour les recettes de l’État.
« Dans les villes occupées par l’armée rwandaise, l’occupation de Goma et Bukavu nous fait perdre 9 % des recettes douanières, soit environ 18 à 22,5 millions de dollars par mois en fonction des estimations de la douane. Du côté de la Direction Générale des Impôts (DGI), c’est 3 % des recettes qui s’évaporent en raison de cette guerre à l’Est », a-t-il déclaré. Ces pertes illustrent l’impact direct que les conflits armés continuent d’infliger sur l’économie nationale, en limitant notamment la capacité de l’État à collecter des fonds essentiels dans une région constellée de richesses naturelles.
Pourtant, Jules Alingete se montre confiant. Il affirme que le gouvernement congolais a mis en place des mécanismes pour minimiser l’impact de ces pertes sur la mobilisation des recettes dans le cadre du budget de l’année 2025. Ce budget, promulgué par le Chef de l’État Félix Tshisekedi le 22 décembre 2024, s’élève à 51.553,54 milliards de francs congolais, reflétant une hausse impressionnante de 25,8 % par rapport à l’exercice précédent. « En dépit de la guerre, toutes les assignations seront atteintes, et nous avons même des raisons d’espérer dépasser les performances des années précédentes », a affirmé M. Alingete.
Le cadre budgétaire pour 2025 reste ambitieux, mais les interrogations sur sa faisabilité sont légitimes. La progression de la rébellion du M23 et la perte de zones importantes comme Goma et Bukavu jettent une ombre sur la capacité du gouvernement à maintenir le cap. Les appels à l’adoption d’un collectif budgétaire pour rectifier le tir se multiplient dans les cercles sociopolitiques nationaux.
En outre, l’IGF a annoncé la suspension des opérations de contrôle dans ces zones sous occupation. « Nous ne pouvons pas et ne devons pas envoyer les inspecteurs dans des zones de guerre occupées. Avant la prise de Goma et Bukavu, nos inspecteurs y étaient déployés. Désormais, il est impossible d’assurer des missions dans ces régions dominées par les rebelles », a précisé Alingete. Cette décision souligne les défis pratiques auxquels sont confrontées les institutions de contrôle en RDC.
Alors que le gouvernement se concentre sur des mesures d’ajustement, une question cruciale persiste : comment compenser durablement les pertes économiques massives infligées par cette insécurité persistante ? Si l’État parvient toutefois à atteindre, voire dépasser ses objectifs fiscaux, cela représenterait une lueur d’espoir dans un environnement par ailleurs marqué par de nombreuses incertitudes.
La guerre à l’Est continue d’agiter les enjeux financiers et politiques de la RDC, menaçant de freiner la croissance économique ainsi que la stabilité du pays. Alors que la mobilisation des recettes est présentée comme un fer de lance du programme gouvernemental, les Congolais attendent des solutions durables à un conflit qui dépasse les simples frontières économiques.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd