Dans les cendres du marché Matadi Kibala, un esprit de résilience naît et grandit. Trois mois après avoir été consumées par un grand incendie, ces femmes commerçantes ont repris, en insubordination, leur labeur quotidien. Elles se réapproprient les alentours de la voie principale, leurs commerces à ras le sol, encerclées par des fils électriques dangereux, coincées entre des arrêts de bus et l’incessante course des poids lourds. Nous avons échangé avec quelques-unes d’entre elles sur leur combat quotidien.

« N’avons-nous pas conscience du danger qui nous guette ici ? Bien sûr que oui, mais il est inhumain que nos dirigeants nous abandonnent à notre sort. Les arrêts de bus et les imposants véhicules en provenance du Kongo Central obstruent presque toute la place. Un chauffeur pourrait facilement perdre le contrôle en manœuvrant pour se garer et cela pourrait conduire à une catastrophe… » se désole Mimy Misenga, une commerçante d’épices.

Le marché Matadi Kibala est étroit, selon Mathe Katuka, une vendeuse de céréales, « Le camp PM, lieu où nous avons été délocalisés après l’incendie, ne peut pas contenir tous les marchands et leurs marchandises. Nous avons accepté de nous y installer pour échapper à un autre drame de 2022. Malheureusement, c’est un lieu reclus qui entrave la circulation rapide des marchandises. »

Avec l’arrivée de la saison des pluies, de nouvelles peurs émergent. « Les fortes pluies et les fils électriques qui rôdent font craindre des incidents similaires à ceux de février 2022. Le gouverneur promet des solutions qui n’ont jamais vu le jour » raconte Bibiche Wambo, une vendeuse de fruits.

Dorcas Kawandjo, de son côté, pousse un cri d’alarme, appelant à l’intervention des autorités. « C’est une véritable survie que nous menons ici. Nous ne pouvons pas abandonner cet endroit pour un autre qui n’est pas propice à notre commerce. Nous sommes en danger constant et nos leaders semblent sourds à nos appels. »

Cet endroit regorge de vendeurs et d’acheteurs qui viennent s’approvisionner en produits de consommation variés. Toutefois, un nuage pesant hante ce marché. Un feu dévastateur avait détruit le même marché le mercredi 2 février 2022, emportant la vie de 26 commerçants dont 24 femmes et 2 hommes.

Suite à cette tragédie, un plan de délocalisation avait été annoncé par le gouvernement, transférant le marché Matadi Kibala vers le camp PM, et interdisant le fonctionnement de tous les marchés informels avoisinants. Mais jusqu’à présent, ces promesses restent vaines. En 2020, le gouverneur de Kinshasa avait annoncé la construction d’un marché moderne à Matadi Kibala. Aujourd’hui, ces travaux sont toujours en suspens. Alors que la promesse d’un début de travaux dès la disponibilité des fonds avait été faite en août dernier, des rumeurs parlent aujourd’hui d’un litige foncier sur le terrain prévu pour la construction..

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