Lancée ce dimanche 19 novembre, la campagne électorale connaît déjà son effervescence dans le Grand-Nord-Kivu (Beni, Butembo et Lubero). En arpentant les rues de Butembo, les beaux écussons des candidats nous interpellent depuis chaque coin de rue, chaque poteau publicitaire. Partout, on sent la démocratie en mouvement : on entend les débats s’intensifier dans les assemblées des jeunes, on voit les fidèles des églises s’interroger sur le sens de l’engagement politique.
Pour ces élections de 2023, la compétition est féroce. Au delà de 600 candidats aux places de députés, tant nationaux que provinciaux, se battent pour chacun des neuf sièges du territoire de Lubero. Un nombre impressionnant qui alimente la tension électorale.
Un détail est toutefois frappant pour Butembo, Lubero et Beni : cet engouement pour les élections se présente alors que leur orientation politique habituelle – en faveur de l’opposition – semble avoir basculé derrière un même homme, Félix Tshisekedi.
Effectivement, nombreux sont ces anciens rivaux politiques qui se sont unis dans le même camp, celui de l' »Union sacrée ». Ce nouvel élan de solidarité politique « réduit le risque de tensions pendant la campagne », selon un analyste politique local.
Cependant, si l’union est réelle au niveau présidentiel, la situation semble plus fragmentée pour les élections législatives. Chaque acteur politique ayant sa propre formation ou regroupement, la compétition reste féroce sur ce terrain.
En dépit cette avancée pré-électorale, Félix Tshisekedi doit faire face à une problématique qui pourrait bouleverser son destin : l’insécurité. Le Grand Nord est plongé entre deux conflits dévastateurs : les tueries des ADF à Beni et l’activité meurtrière des M23 à Rutshuru. La situation actuelle est telle que certaines personnes, comme Alzon, se voient contraintes à quitter leur domicile et leur commerce, aujourd’hui la proie des crises sécuritaires. Selon lui, « la situation s’est détériorée qu’elle ne l’était » avant l’élection de Félix Tshisekedi.
Et l’insécurité n’est pas le seul talon d’Achille du président candidat. À l’aube de cette nouvelle échéance électorale, Tshisekedi n’affiche à son actif aucun accomplissement notable en terme d’infrastructures. La situation contraste fortement avec celle de son prédécesseur, Joseph Kabila, qui a su marquer les esprits par la construction de la première voie asphaltée de ces deux villes.
Bien que certaines actions aient été entreprises sous son mandat, telle que la construction d’écoles et centres de santé et l’adhésion à l’EAC, elles ne bénéficient qu’à une petite partie de la population, en grande majorité des opérateurs économiques. « Le candidat président qu’il [le citoyen lambda] soutient doit d’abord assurer sa sécurité avant tout autre chose », affirme Jacques Mukosasenge, une personnalité politique locale.
Malgré cette opposition dispersée, l’analyste Jackson Bwahasa envisage un possible sursaut pour Félix Tshisekedi. « On n’est prêt à lui renouveler confiance pour voir ce qu’il fera en président libre », pense-t-il. Seule ombre au tableau, « il a trop promis en matière de pacification. S’il y a un opposant qui tient un discours crédible de ce côté là, il peut déstabiliser Félix Tshisekedi ».
Ainsi, ces élections de 2023 pourraient voir un basculement auquel personne ne s’attendait. En attendant, les citoyens du Grand Nord-Kivu sont prêts à aller aux urnes : le 27 novembre prochain, ils accueilleront la candidature de Denis Mukwege, en attendant celle prévue de Tshisekedi dans la première semaine de décembre. Un moment déterminant se dessine sur l’horizon politique de cette région..
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